Visite chez Thierry Constantin, du marathonien au vigneron militant

Après mes visites chez Mythopia puis chez Provins (des rencontres déjà relatées en ces pages), la journée n’était pas finie. Avant de rentrer dans les montagnes neuchâteloises, j’avais aussi rendez-vous chez Thierry Constantin, vigneron-encaveur dans la commune de Pont-de-la-Morge (commune limitrophe de la capitale valaisanne Sion, et située à l’ouest de cette dernière).
Je trouve Thierry dans une excellente forme et détendu …bien qu’il faisait de menus travaux de comptabilité professionnelle en nous attendant.
Nous discutons un petit moment, puis dégustons les vins qu’il nous propose. L’homme est cordial, toujours heureux d’échanger avec autrui. La passion du vin n’est pas seulement le hobby du blogueur ou de l’amateur. Elle est surtout celle du vigneron avant d’être sa raison de vivre. Vous trouverez certainement Thierry réservé lors de vos premiers passages route de Savoie 99 (où lors d’un salon). Par besoin sans doute de connaître un peu et de s’habituer à ses visiteurs.
Ce n’est pas pour rien que l’on peut lire sur son prix courant et sur son site internet cette phrase d’Hâfiz :
« Le soleil est chaud comme le vin, et la lune est froide comme une coupe. Verse le soleil dans la lune, le visage de l’amour ne peut se voir qu’en rêve »
une grappe d'amigne de Vétroz
Une grappe d’amigne de Vétroz. Ce cépage rare (40 ha planétaires peut-être, la majorité se trouve à Vétroz) se plait tout particulièrement sur les sols de brisés (schistes) de cette commune du Valais central.
Physiquement, il reste d’une finesse enviable. L’ancien marathonien a conservé de ses années de de sportif de haut niveau une fine silhouette élancée. Sachez que Thierry a été possesseur en son temps d’une meilleure performance suisse sur la distance du marathon avec un chrono de 02h 14. Les connaisseurs apprécieront. Pour les autres, sachez que pareil chrono aurait pu lui servir de sésame à des mondiaux d’athlétisme où à des jeux olympiques.
Le temps ? « Tout va trop vite me dit-il en soupirant. Les vins sont à peine terminés qu’il sont mis en bouteilles et dégustés, car il faut communiquer au plus vite sur le nouveau millésime avant de le vendre ».
Connaissant quelque peu le vigneron militant car nous avions pris plaisir à échanger des courriels l’an passé pour poursuivre en privé une discussion lancée sur le blog d’un ami commun, je perçois qu’elle est sa cible…
Le vigneron encaveur essaie donc de retarder le plus possible la mise en bouteille de ses vins, afin qu’ils se présentent avec un supplément d’affinage lors de l’arrivée chez le client. C’est donc délibérément en cette fin février, que les vins du millésime 2008 sont encore à la vente (la cave pourrait être déjà vide depuis trois bons mois).
Les vignes :
5,5 hectares de vignes, en rive droite du Rhône, principalement en premier coteaua. Elles se trouvent principalement sur les communes de Sion et de Vétroz (dont il est membre du groupement des vignerons encaveurs). Les sont cultivées  selon les règles production intégrée, et obtiennent d’ailleurs le certificat de Vitival (l’association valaisanne de production intégrée).
Parlons désormais de la carte des vins :
Cette dernière est l’une des plus courtes que je connaisse en Valais avec seulement 13 vins. Douze monocépages et un assemblage rouge. Pour être précis le vigneron propose six vins blancs secs (ou presque secs, voire plus bas), six vins rouges, et un rare liquoreux de Johannisberg. (sylvaner).
Les vins dégustés :
Les vins blancs, tous issus du millésime 2008 se présentaient avec beaucoup de franchise, de tension et de pureté. Seul le chasselas m’a paru ce soir là un peu en dessous des autres vins de la gamme. A revoir.
J’ai pris beaucoup de plaisir avec les autres vins. Le sauvignon blanc est racé, frais, tendu et mûr, avec de beaux arômes fruités (amateurs de pipi de chat, passez votre chemin). Un vin à la vocation gastronomique indéniable. Le viognier possédait la même patte, il était un peu moins expressif (puissance aromatique), ainsi d’ailleurs que la petite arvine qui n’était pas la plus expressive des vins présentés par le vigneron, mais elle était typée.
J’ai aussi beaucoup aimé le savagnin blanc réserve, délicat au nez avec des arômes de fruits rouges, d’épices, et tendu comme un arc en bouche. La richesse de la matière étant masquée par la tension. Ainsi que pour les autres vins (sauf le chasselas), Thierry Constantin n’a pas réalisé une seconde fermentation (la « malo »). Il en résulte donc des vins à la fois riches, mais viriles, tendus et élégants.
Un dernier vin blanc très apprécié, c’est l’amigne de Vétroz. Le « puriste » grimacera un peu en voyant les deux abeilles sur l’étiquette, mais en dégustation, il reconnaîtra que ce vin cache bien son jeu. Dix huit grammes de sucre résiduel, mais à l’instar des vins précédents, il n’a pas été réalisé de seconde fermentation. Il en résulte une amigne fine et agréablement mordante, tout en étant légèrement douce (un doux très fondu). Beaux arômes typiques de l’amigne, dont l’écorce d’agrume. L’équilibre de ce vin est magistral. Bravo !
amigne 1969
Thierry avait fêté ses 40 ans avec une amigne de 1969.
Pressés par la nécessité pour ne pas dire par les impératifs de retour, nous ne dégusterons des vins rouges qu’un gamay vieilles vignes et le cornalin « Aguares ». Un cornalin sur le fruit, vif, élégant et digeste. Un vin, si l’on veut bien, construit à l’image du vigneron.
Un grand merci pour ton accueil Thierry. J’essaierai de revenir prochainement au Pont de la Morge pour déguster les autres vins. Et puis, j’y pense, nous n’avons pas eu le temps de lancer réellement sur la piste le vigneron militant (Thierry Constantin est l’actuel président de l’Union des vignerons-Encaveurs du Valais).
Lors du festival « Syrah au fil du Rhône en novembre 2010, j’ai pu déguster une verticale de 08 vins de syrah de Thierry Constantin.
Laurent
Les coordonnée de Thierry Constantin :
Route de Savoie 99
1962 – Pont de la Morge
00 41 79 433 16 81
info(at)thierryconstantin.ch
site : www.thierryconstantin.ch