Alzheimer Weinland ?

où « Aurais-je la Mémoire Des Vins Suisses qui flanche » ?
Le concept de base ne semble pas avoir changé. Il vise à démontrer le potentiel de garde des vins suisses issus de cépages, de producteurs et de régions différentes.
D’une certaine façon, il est entendu que les vins sont bons, puisqu’ils sont réalisés par la crème de la viticulture nationale.
Pourquoi pas, en effet, chercher à faire face au déficit qualitatif d’image des vins suisses, en démontrant que les meilleurs crus du pays possédent un potentiel de garde certain, à l’instar de ceux des grandes régions viticoles de notre planète. Idée louable et novatrice, bien que limitée par son caractère volontairement consensuel (voir plus bas).
Donc, on part avec quelques vignerons volontaires (de préférence très prisés, puis on agrandit le cercle des participants progressivement. A ce jour trente producteurs. Un total de cinquante membres est souhaité.
Dix ans après le lancement du projet et de l’association, et une dégustation publique romande plus tard, essayons -avec la complicité d’un internaute lecteur (présent à la dégustation de Genève) de réaliser un état des lieux :
L’association « Mémoire Des Vins Suisses » poursuit sa progression puisque de nouveaux arrivants se joignent régulièrement à l’aventure. Une bonne nouvelle : les régions représentées poursuivent leur tentative de diversification, ainsi le Vully est désormais représenté par le Traminer de l’Hôpital de Morat (un vin qui m’a beaucoup plu à Vullyssima récemment). La région des trois lacs compte désormais un représentant pour chacun de ses vignobles.
Un ensemble de vins présentés  qui semble bien disproportionné :
+ le rapport vins rouges et vins blancs (secs) est de deux tiers contre un tiers. Il apparait évident que les rouges sont sur-représentés.
+ sur l’ensemble des vins rouges on relève :

  • 50% de pinots noirs barriques dont six des Grisons, dont la surface viticole est de 500 ha. Rappel 15.000 ha pour l’ensemble de la Suisse.  Et les journalistes de la MDVS de déplorer l’absence d’un vin de chez Gantenbein dans une interview lue récemment (à moins que l’on souhaite leur chardonnay) !
  • 25% d’assemblages type bordelais (merlot, cabernet franc et cab. sauvignon).

+ côté blanc, on aurait pu sans autre rajouter un ermitage, un païen, une amigne ou un johannisberg, voire aussi une humagne blanche.
+ mais pourquoi un chardonnay neuchâtelois ? Ce canton compte seulement 20 hectares de chardonnay contre près de 300 pour le pinot noir. Ne se trompe t-on pas de « cible promotionnelle » ici ?
+ pourquoi aussi du sauvignon blanc ? Cépage planté en Suisse pour la 1ere fois en 1983 (par le vigneron genevois membre de la MDVS). A quand du Scheurebe, …
Autorisons-nous quelques questions :
—> aurait-ce été un luxe que de présenter une deuxième syrah, un cornalin de plus ou une humagne rouge à la place de cette légion de pinots ?
—> alors que le chasselas valaisan (Fendant) a  été largement arraché pour être remplacé par d’autres cépages (souvent autochtones, mais pas seulement) il n’est pas représenté  (toujours plus de 1200 ha aujourd’hui). Preuve de son désintérêt ?
—> comment le Tessin (1200 ha de surface viticole) peut-il compter cinq représentants, soit autant que Vaud (3800 ha) et presque autant que le Valais (5200 ha et six représentants) ?
—> soixante bouteilles de chaque vin sont misent annuellement de côté ! Il serait intéressant de savoir à quel rythme ces vins ont été et seront dégustés ?
—> qui paie  cette oenothèque ? Sur le site de la MDVS, on n’évoque pas de généreux mécènes. ou sponsors qui financeraient cette opération. Il est fort à parier que les journalistes de la MDVS n’ont pas les reins suffisamment solides pour acheter 1800 bouteilles par an aujourd’hui et demain 3000.
Sont-ce les producteurs qui offrent les flacons (en plus du paiement de leur cotisation de membre) ? Si c’était le cas, la MDVS serait de fait subventionnée par les clients des caves et domaines membres…
—> si le vin d’un membre venait à moins tenir la distance que les autres, risquerait-il une « disqualification » ? Etre membre du MDVS comporte t-il un risque ?
La MDVS doit faire face à une « concurrence »  qui veut du bien aux vins suisses :
On l’a vu, en dix ans, des dégustations diverses ont mis  en lumière la capacité réelle de bonification des crus helvétiques, tant d’un point de vue qualitatif, que de vieillissement réel :
—> le cornalin 2004 du Domaine Cornulus a récompensé les deux vignerons d’une distinction de « meilleur vigneron de l’année 07 » par Michel Bettane et Thierry Desseauve.
—> au même moment, le Grand Jury Européen classait cinq vins de syrah valaisans (et un vaudois) dans le gratin mondial des producteurs de ce cépages. Les vins suisses trustaient le podium et se situaient tous dans les dix premières places (sur 41 vins).
—> les dégustations de Dominique Fornage (voir sous liens)
—> le Dézaley est un cru ayant fait ses preuves en terme de capacité de vieillissement (voir sur ce blog par exemple). Il est possible d’acquérir aisément des vins de vieux millésimes (trente ans et plus) auprès du commerce de vins de Georges Wenger par exemple.
—> L’association VINEA possède également une oenothèque de vins valaisans « d’exceptions » et de garde.
Des regrets :
Ajouter de la rareté à la rareté. Ainsi, le cornalin de Denis Mercier, un vin qui n’est produit qu’à 1800 bouteilles par an, verrait ainsi 03 % de sa production « dévoyée » en faveur de la MDVS. Certes, le vigneron sierrois est, comme les autres, volontaire dans l’opération.
La qualité gustative des vins, est largement sous évoquée au profit de la capacité de garde des vins.
Aucune synthèse de l’évolution des vins n’est consultable sur le site de la MDVS. Pour avoir de la mémoire, encore faut-il avoir un support, non ? Quel intérêt pour cette démarche, si elle n’aboutit pas à un compte rendu écrit ? Cet aspect reflète un manque de transparence : quid des résultats du vieillissement de ces vins ? Est-il réellement un plus ou relève t-on des problèmes ?
La vraie bonne nouvelle :
Même en se donnant du mal à participer  à un maximum de dégustations, et en multipliant les visites dans les caves, un amateur ne peut que très difficilement réussir à connaître l’ensemble des vins sélectionnés. Les dégustations de la MDVS permettent de découvrir ces vins rares en une seule occasion.
Un espoir :
Que la MDVS annonce ses rares dégustations publiques autrement qu’avec une semaine à l’avance seulement.
Car il faut le dire : une dégustation de la MDVS, est une sacrée opportunité de rencontres et de dégustation offerte aux amateurs ! Pour ça chapeau !
 
Laurent