Les vins de la maison Bolle & Cie ? Toujours plus hauts !

Jean-François Crausaz est à la fois discret et efficace. Le maitre de chai de la maison Bolle (Morges) est avant tout un passionné qui aime le travail bien fait, tant pour la maison pour laquelle il travaille, que pour les vins de Morges en général. Une appellation pour laquelle il s’investit pleinement.
Après une fort belle dégustation réalisée au Domaine de Plessis durant le mois de juin l’an passé, nous nous sommes retrouvés au même endroit pour une dégustation aux accents plus hivernaux.
La dégustation a débuté fort ! Du premier vin, je ne puis rien dire, sinon que vous pourrez le découvrir en avant-première au salon Divinum, du 11 au 16 avril prochain. Heureusement il n’y aura qu’un seul embargo aujourd’hui (ce n’est pas le nom de la cuvée).
Chardonnay 2016 (élevage en cuve) : notes de noisette blanche, de fleurs (chevrefeuille) et de fruits blancs (pomme mûre). La bouche est fraîche, fine, gourmande à défaut d’être puissante. Et c’est une chance ! Car cela laisse dès à présent la place à la finesse. Ce chardonnay se présente donc de façon délicate, subtile, avec une dimension saline discrète.  La finale est très persistante. Ce vin qui a déjà huit mois de bouteille continuera à se révéler dans les années 2 voire trois à venir. Pour autant qu’on lui en laisse le temps.  
Pinot Gris 2016 (cuve) : le nez est typé, mais encore retenu, car il manque un peu d’intensité : fruits exotiques tels que le lichee, la mangue, mais aussi le miel d’acacia. La bouche est grasse, riche, mais fraîche, car une acidité de bon aloi permet à ce vin de ne pas verser dans l’opulence. En le dégustant je me suis demandé si une part élevée en fût de chêne (de 2e où 3e vin) n’aurait pas permis d’ouvrir plus rapidement ce vin ? Belle longueur en bouche.
Viognier 2016 : ici, du bois neuf, il en est justement question ici (à faible dose : 15 %). Mais n’en faisons pas une question essentielle !  Ce viognier est comme je les aime : fin, délicat, frais, sec, mais pas nerveux, et bien sûr il est long.en bouche, et fruité : fleurs blanches au nez, pèche, et aussi abricot en finale. Coup de coeur !
Brut de Licorne : un vin effervescent élevé par Daniel Marendaz et sa famille à Mathod, dans le Nord vaudois, car la prise de mousse, l’effervescence requièrent un savoir-faire. Autant se diriger vers les artisans qui possèdent ce savoir-faire. Issu du millésime 2015 (ce n’est d’ailleurs pas indiqué sur le flacon), ce vin a été dégorgé fin octobre l’an passé. Il est issu du seul pinot noir (soit un Blanc de Noir). C’est un brut qui tient plus de l’extra brut dans les chiffres (avec 1,6 gr de SR), mais l’équilibre en bouche est là, et je rassure sans attendre ceux qui craignent que cette Licorne là soit brute …de décoffrage.  Enfin, le nez ! Il est intense, avec des notes de pèche, floral aussi. Offrez lui quelques mois pour se reposer de sa mise. Il vous le rendra bien !
Oeil-de-Perdrix 2017 du ch. de Vufflens :
Une cuvée « estampillée » Clos, Domaines & Châteaux. La robe est saumonée, pâle. Le nez a une belle intensité, avec des notes de fruits rouges, framboise, groseille à maquereau. La bouche offre finesse et fraîcheur et un très beau retour du fruit. C’est un vin élevé en foudre de bois, une fois la vinification en cuve faite. Plutôt léger (a contrario de certains rosés construits sur un gras imposant) c’est un vin équilibré et long.
Garanoir du Domaine de Sarraux-Dessous 2016 : un vin qui a été élevé pour 3/4 en foudre de bois, et pour 1/4 en barrique. La robe est sombre, légèrement brillante. Le premier nez est sur une note de fumée, puis viennent des fruits noirs tels que la mûre, le sureau. Enfin, c’est une note de cacao amer qui apparait. La bouche est riche, avec de la finesse, de l’équilibre et de forts jolis tanins serrés, mais sans dureté. Belle longueur. Voici un garanoir typé, franc, agréablement complexe et riche, très aimable à boire, et à l’élevage parfait.
Les Dioscures 2016 : c’est un assemblage de gamaret et de garanoir. Elevage partiel en barrique. Fruits rouges et noirs au nez (framboise, mûre), la bouche offre de la concentration et de la fraîcheur. Equilibrée, elle nécessite un peu de garde pour que les tanins s’assouplissent un peu. La cuvée est prête pour une garde moyenne, et révèlera pleinement son potentiel dans trois ans certainement.  Un assemblage réussi, et fort apprécié.
Pinot Noir 2015 Jean-Jacques Bolle (barrique) : Le premier millésime de cette cuvée date de 1978. La robe est d’intensité moyenne, sur une belle couleur grenat. Le nez est de bonne intensité, avec surtout des fruits noirs qui dominent. Une note de framboise apparait à l’aération. La bouche offre une belle richesse, de la tanicité. La finesse est donc forcément aujourd’hui un peu en retrait. Mais tous les éléments sont là, car fraîcheur et équilibre sont aussi  au rendez-vous. C’est un pinot noir puissant, qui demande de la garde. Très apprécié.
Merlot de Sarraux-Dessous 2015 : Robe sombre, plutôt mate. Le nez offre un première note lardée et fumée, puis des fruits noirs. La bouche est riche, mais fraîche, avec de beaux tanins serrés mais déjà très fins. La matière est racée, élégante, équilibrée. Ce merlot a un fort joli jus en bouche. Le boisé est parfaitement dosé. Très jolie longueur finale. Il ne peut aller qu’en s’améliorant.
Un vin très séduisant mais pas  aguicheur. Coup de coeur.
Gamay 2015 barrique : déguster un gamay après un merlot diront certains, voila qui ne manque pas d’audace !  Robe de belle profondeur. Nez intense sur des fruits rouges, la bouche est élégante, à la fois riche et offrant beaucoup de finesse, d’équilibre. C’est un vin qui je qualifierai lui aussi de racé, avec juste ce qu’il faut de tension. Très belle longueur finale. Ce gamay est complet, il offre du fruit, un caractère minéral, de la concentration et de la fraîcheur.  Coup de coeur.
A 19 CHF c’est vraiment une très belle affaire. Le cépage est respecté. Le boisé est finement dosé. Bravo.
Galotta 2015 (barrique) : La robe est sombre, mate. Au nez, après une première note fumée, les fruits noirs sont bien présents, ainsi que le cacao (qui n’est pas amer). Belle attaque, nerveuse, puis finesse et équilibre s’installent. Le Galotta a du coffre, de beaux tanins. Certes, il est un peu plus rustique que le gamay, mais il ne manque en aucun cas d’offrir du plaisir. Les amateurs trouveront en lui un compagnon fruité, riche, et aimable. En fin d’année, le boisé sera moins marqué, et il accompagnera sans  coup férir une chasse, elle aussi un peu rustique.
Cuvée 5 Sens millésime 2007 : c’est un peu une cuvée sortie de « derrière les fagots ». Une surprise comme les vignerons et maitre de chais aiment à sortir pour montrer que leurs vins  savent vieillir.  Chez Bolle, on vend actuellement le millésime 2013.  Cinq Sens, car c’est un assemblage de cinq cépages (pinot noir, gamaret, garanoir, merlot et gamay).  Le premier nez surprend par ses notes de camphre et d’eucalyptus, qui signent de la fraîcheur ! Puis des notes de fruits rouges confits, tels que la cerise.  En bouche, les tanins sont fondus, gras.
Ma première impression, c’est que le vin est à boire. Mais en le re-goûtant, je me rends compte qu’elle tient bien cette bouche. Certes, il n’est plus nécessaire d’attendre ce vin. Il faut profiter de ce qu’il offre. Une garde de dix ans, c’est déjà fort honorable. Bravo.
On termine en roue libre : Domaine du Plessis 2007 :
La robe n’est pas impactée par les années. Elle reste jeune, d’un joli jaune tendre, brillant, sans le moindre cheveux gris qui pointe. Le nez est …net, franc, intense, sur des notes de fruits blancs et jaunes mûrs. La bouche est riche, fine, équilibrée, agréablement grasse, très longue et qui a gardé toute sa fraîcheur.
Ce chasselas, pressé à l’ancienne (à voir cet automne la pressée publique dans la cour du Domaine du Plessis), est un vin gourmand, savoureux et racé. Décidément, les beaux terroirs de La Côte offrent un potentiel de garde  certain. Quel plaisir. Merci pour le partage Jean-François.    Coup de Coeur bien évidemment pour un vin qui aurait mérité un article à lui seul !