Lavaux Vin Bio : plus que des vins de qualité : un état d'esprit !

Lavaux Vin Bio est un petit salon qui se démarque des autres par son état d’esprit. On peut ressentir de l’envie et du plaisir partout bien sûr. Mais Lavaux Vin Bio cultive quelque chose de singulier, c’est une sorte d’espace « bien-être », où le visiteur est loin des contingentements et des obligations de ce monde, de son stress. Il y a une sorte de bienveillance lorsque l’on y est.
Sensation qui est peut-être aidée par le fait que la première singularité du salon est qu’il se déroule dans un domaine viticole. La première édition s’était tenue l’an passé au Domaine de Gilles Wannaz, à la Tour de Chenaux. Cette année c’était au Domaine des Faverges, dans une sorte d’isolement de bon aloi, à distance de toute commune immédiate (Chexbres est à un bon kilomètre) que s’est tenu ce micro salon.
A Lavaux, la vue est souvent à couper le souffle. Depuis les Faverges, on est gâté : le domaine est idéalement situé sur un balcon naturel, entouré de vignes à 360°. La bâtisse principale est de grande taille, elle en impose, tout en conservant son âme de corps de ferme.

La seconde singularité, c’est que les vignerons qui y participent se sont choisis. Ils partagent d’une certaine façon un « idéal », mais surtout une conception du travail commune, et une volonté de rompre avec une « tradition » héritée  et non désirée.

Et les vins me direz-vous ?
Vraiment d’excellentes choses dégustées ai-je envie de vous répondre. Chaque vigneron a son style, et ça, c’est hautement respectable et agréable. J’ai un peu lambiné aux stands à discuter avec les vignerons, et des visiteurs (dont des vignerons bio d’autres régions, voire aussi des « conventionnels » venus de Lavaux.
Dans un style peut-être très conventionnel, mais pourtant très pur et stylé, j’avoue un coup de coeur pour le chardonnay du Domaine de la Bolliataz de Charles Rolaz. Joli chasselas  et sauvignon blanc. L’assemblage merlot et malbec a du coffre et demande un peu de temps.
Chez Pierre-André Jaunin : c’est la finesse qui ressort le plus de ses vins, qui ne sont pas bâtis dans un style qui se veut impressionnant. C’est en fait tout l’intégrité et la sincérité du vigneron qui se retrouve dans ses vins.
Chez Blaise Duboux : deux chasselas seulement : la cuvée d’Epesses, d’une grande franchise et d’une belle intensité. Le Dézaley Haut-de-Pierre est un vin raffiné. Le Plant Robert est « hors classe ». Lors de mon passage, la marsanne était hélas devenue trop chaude. Mais quelle matière ! Le chardonnay est lui aussi riche et intense. Aujourd’hui il est encore marqué par son élevage en fût.
Chez Gilles Wannaz : très joli vin rouge (un assemblage de 4 cépages si j’ai bien compris) et de beaux vins blancs très fins, minéraux, purs. Et puis un joli nom pour une cuvée très intéressante : Premier de gorgée. La beauté du jeu de mot en prime !

Chez Pierre Fonjallaz, la surprise de découvrir un Calamin jeune aussi ouvert, et pourtant avec un réel potentiel. Il est délicieux et en prime à 16,50 CHF il est vendu à un prix peut-être pas cadeau, mais en deçà de sa valeur réelle, si on le compare aux prix proposés pour ce Grand Cru. Je suis un peu moins à l’aise avec le Dézaley barrique (chasselas). Mais c’est un choix du vigneron et s’il le fait c’est aussi parce qu’il a une clientèle. Enfin, j’ai eu un coup de coeur pour l’assemblage Rouge de Treilles. C’est un Dézaley plein de vigueur et de force, bien élevé et riche en fruit. A 27 CHF c’est là aussi un très beau rapport qualité/prix proposé. Le merlot issu du Calamin est un vin puissant qui va demander du temps pour se fondre.

Au Domaine de Jean-Christophe Piccard : s’il est une tête chercheuse dans le groupe des vignerons du jour, c’est peut-être bien lui. A commencer par un chasselas de Coup de Fouet non filtré, mais surtout des vins blancs minéraux, fruités et d’une jolie finesse. Parmi les vins rouges ma préférence allait vers l’assemblage de Villette « Charmilllon », le plus complexe et aussi le vin qui a dégagé le plus d’émotion. Jean-Christophe Piccard est un convaincu, et il prend le temps d’expliquer sa démarche.

Le chai en sous-sol du domaine des Faverges contient de grands foudres, et un oeuf en bois aussi original qu’unique en Suisse.
Je termine ce tour d’horizon par le domaine hôte de cette édition 2018, le Domaine des Faverges.
S’il en est un autre de vigneron qui aime à tester c’est bien Gérald Vallélian. « Sa » partie du Domaine est certifiée Bio-Suisse depuis 2015. L’autre partie, conduite par un autre vigneron, devrait elle aussi réaliser sa conversion sous peu ai-je entendu. Les vins blancs ont du coffre, de la minéralité et de la tension. J’ai beaucoup aimé la syrah 2016 pour son fruité et sa fraîcheur. Le millésime 2015 ouvert dans les cuisines, presque en catimini, pour le partage avant toute chose, m’a permis de sentir le potentiel de la syrah au domaine des Faverges (ceux qui ont goûté celle « des » Grognuz par exemple sur de grands millésimes, savent déjà de quoi je parle. Joli Merlot également.
Décidément, en vins rouges, Lavaux une fois sorti du Pinot noir et de son Plant Robert, peut offrir de sacrées découvertes et surprises !
Un petit salon où l’on se sent bien, et où les vins sont bons et même très bons bien sûr. A côté de l’espace dégustation qui était dans la salle des pressoirs, il y avait un bar sur la terrasse (voir photo ci-dessus) qui aura été très bien visité par le public du jour, une cuisine simple mais goûteuse. Le succès populaire aura été au rendez-vous (voir les photos de la salle de dégustation). Un autre indice du succès de Lavaux Vin Bio : la disparition quasi complète de la palette des verres à destination des oenophiles.
Reste à savoir où se tiendra l’édition 2019. Puisque des travaux pour deux ans vont débuter aux Faverges, ce n’est pas ici que l’on s’y retrouvera, en tout cas avant 2021.