Mes visites de caves
Visite au Domaine des Moines, à Villeneuve, chez Serge Diserens.
Voici un moment que Serge Diserens m’avait proposé de venir lui rendre visite. C’était bien avant la dégustation des vins du Chablais organisée en fin d’année passée. Une dégustation d’un excellent niveau général, et où dont les vins de ce vigneron s’en étaient trouvés à leur avantage. Chaque dégustateur présent ayant fait de l’un de ses crus un coup de coeur.
Avant cette dégustation, je ne connaissais que son gamaret.
Contrairement à ce que j’avais écrit dans un des articles sur cette dégustation, Serge Diserens ne vinifie pas les vins du domaine de La Baudelière, appartenant à son épouse, Stéphanie Delarze-Diserens. C’est elle qui réalise ce travail, dont la maman gère l’aspect viticole du domaine de La Baudelière.
Tout comme son mari, Stéphanie Delarze-Diserens a hérité du domaine de son grand-père.
A eux deux, ils possèdent deux domaines d’une surface totale de 8,5 ha : 5,25 pour Les Moines, 3,25 ha pour La Baudelière (2,0 à Aigle, 1,25 à Yvorne).
Les vignes du Domaine des Moines sont en production intégrée, mais un hectare est toutefois cultivé en bio.
Nous lançons rapidement la dégustation à mon arrivée, après avoir évoqué les spécificités du terroir de Villeneuve, reposant sur trois types de sols principalement : morainiques, d’alluvions et de colluvions, et de cônes de déjections : de la Crête, de la Tinière.
Serge Diserens est tombé dans le métier très tôt. Une passion qu’il doit à son grand-père paternel principalement, mais aussi à son père. Né en 1977, il me confie avoir réalisé sa première année viticole seul en 1986, à l’âge de 09 ans ! Il lui avait été confié la responsabilité de plusieurs ceps, jusqu’à leur vendange. Le produit de la récolte était d’un total de 20 litres. Après la vinification, il avait été jusqu’à dessiner puis couper lui-même les étiquettes de sa cuvée, avant de les coller sur les bouteilles.
Depuis sa formation d’Ingénieur HES en oenologie à Changins, la fibre de l’ingénierie ne l’a jamais quitté. Dans sa cave, il aime à transformer son matériel à son avantage, ce qui lui permet de réaliser de substantielles économies au contraire de l’acquisition de matériels neufs.
Depuis quatre ans, il enseigne aux étudiants de Changins les techniques de cave. Un poste tout trouvé pour lui. The right man at the right place !
La dégustation des vins de Serge Diserens :
Chasselas de Villeneuve Les Moines 2015 : Des notes de levure au 1er nez, puis de fleurs blanches. La bouche est fruitée, riche et tendue, très fraîche donc, avec un caractère minéral assez marqué sur la finale.
Chasselas Clos des Mennettes 2014 : un terroir de 7.000 m » avec des vignes plantées en 1970qui présente sous un mètre d’argile une bande de gypse. Nez sur les fleurs d’acacia, d’anis. En bouche un peu de CO2 très fin, un toucher de bouche très fin, avec une forte présence minérale, une finale citronnée. C’est un vin très sapide, agréablement tendu.
Riesling Les Moines 2014 : Une cuvée élevée pour un tiers en cuve, pour un autre tiers en barrique, et pour le dernier tiers sous forme de vin orange (un vin où macération et vinification se font dans la barrique). La fermentation malolactique a été faite en entier. Le nez est très fin, expressif sur des notes de fruits jaunes, de coing. La bouche est à l’image du nez : riche (sentiment peut-être augmenté par les 2 gr de sucre résiduels qui n’ont pas fermentés), fine, toujours sur les fruits jaunes, très belle longueur finale.
C’est un fort joli vin, qui n’est pas dans les canons habituels de la dégustation de ce cépage, que ce soit en Allemagne où en Alsace, mais il se présente néanmoins avec beaucoup de naturel.
Rosé Les Moines 2015 : c’est un rosé de presse de pur Gamay. On comprendra donc cette cuvée est prise avec beaucoup de sérieux au Domaine des Moines.
Jolie robe, le nez est fruité, avec des notes de fraise, de groseille. La bouche est fraîche et fine, équilibre, entre le gras et l’acidité. Belle longueur. C’est un vin désaltérant, qui se vend toute l’année me dit Serge Diserens.
Cuvée Napoléon III: Il s’agit d’un assemblage de gamaret, garanoir, de diolinoir et de pinot noir (très majoritaire). Les cépages sont vinifiés séparemment, puis assemblés. Nez sur une note florale évoquant la rose (le diolinoir en serait « responsable »), de réglisse. La bouche est équilibrée, mais avec de la densité (agréable masse tannique), une jolie longueur. Une fois encore, il faut souligner la qualité du toucher de bouche. Serge Diserens produit des vins sensuels !
Pinot Noir de Villeneuve, Les Moines 2014 : la première information à communiquer sur cette cuvée, c’est qu’elle est réalisée à partir de six clones d’origines différentes, de quoi avoir des éléments de fruité, de finesse et de tannicité différents. Très belle robe rubis. Le nez très fin sur des notes de groseille, d’épices. L’attaque en bouche est franche, le milieu de bouche est un peu tendre, certainement le tannin des barriques qui a apporté une légère sucrosité. Beaucoup de finesse et d’élégance et fort belle longueur.
Gamay Vieilles Vignes Les Moines 2014 : Au nez, des notes de café, de fruits rouges, de réglisse. En bouche, ce gamay est très agréablement concentré, fin et long. Il a été élevé en barriques de 4e et 5e vins durant neuf mois, ce qui a apporté une micro-oxygénation durant l’élevage de ce cépage particulièrement réducteur.
Gamaret Les Moines 2013 : Voici un vin qui s’était illustré lors de ma dégustation chablaisienne de fin d’année passée. Robe sombre et mate, le nez est sur des notes d’épices douces et de fruits noirs, la touche toastée de la barrique est perceptible mais pas envahissante. L’élevage sous bois a duré 24 mois. Pour supporter cette durée d’élevage, les rendements sont très bas, de l’ordre de 2 à 4 dl au mètre carré. Une fois encore, la qualité de bouche surprend, et la finesse de la matière prend le dessus sur la concentration et la puissance. En bouche aussi, le boisé est intégré et ne pose aucun souci. Très jolie longueur finale. Attention à ne pas servir ce vin un poil trop chaud, l’équilibre général s’en ressentirait et pourrait laisser l’alcool prendre le pas sur la finesse et la délicatesse de la matière. Très apprécié. Quelques 2000 bouteilles de ce Gamaret par an sont réalisées.
Nous arrivons désormais aux trois vins élevés de façon confidentielle, puisque chacune de ces cuvées est élevée à raison de 1500 bouteilles par an plus ou moins.
Terra Solis 2012 : (un assemblage de cabernets, et de merlot) : Une vigne située près de la Lizense, entre Leytron et Chamoson. Premier nez sur une note de poivron, puis de chocolat. C’est un vin puissant, faisant montre d’une belle maturité, surtout en bouche, fin, long, doté d’une belle acidité. Elevage en barrique durant 36 mois !
Terra Solis Syrah 2013 : 30 mois de barrique pour son élevage, dont 50 % de fûts neufs. Le nez est un peu discret, mais le fruité est très présent à la rétro-olfaction (cerise rouge, noyau d’amande), eucalyptus (élevage). L’attaque en bouche est vive, franche et fraîche. Beaucoup de finesse se développe en milieu et fin de bouche, où la richesse se manifeste aussi. La finale est longue, sur le fruit, avec une sensation caressante, un peu sucrée. C’est un vin très apprécié également.
Malbec 2013 : Ici aussi, élevage en barrique durant 30 mois. Très joli nez, avec une note toasté discrète, du fruit, dont une note de cerise noir puissante. La bouche est riche, puissante, les tannins sont veloutés, accentuant la finesse et l’élégance de ce vin. Très belle longueur. Un vin avec beaucoup de mache en bouche, de finesse et d’élégance et à l’élevage abouti où le vinificateur a respecté le travail du vigneron. Un vrai succès ! Bravo !Voila une fort belle dégustation, qui apporte un éclairage supplémentaire sur les vins de ce vigneron-oenologue, par rapport à celle de la fin d’année passée. Merci à Serge Diserens pour son accueil et sa disponibilité.