Mes visites de caves
Une visite au Château de Vinzel, avec Thierry Ciampi !
Arrivé à Vinzel, je me parque à proximité de « l’Avenue des Châteaux ». Il s’agit d’une petite route bien sûr, qui sépare le Château de La Bâtie -dont les vins sont vinifiés par la cave de La Côte, du Château de Vinzel, appartenant au groupe Schenk, avec un bon quart d’heure d’avance sur l’horaire convenu avec Thierry Ciampi.
Cela me permet de me promener un peu dans les alentours, d’aller voir les vignes, de regarder et de photographier les propriétés et les paysages environnants.
Si les deux châteaux sont désormais des propriétés bien distinctes, cela n’a pas toujours été le cas. Une question de succession en semble être la cause. Les deux domaines ont une superficie équivalente, de dix hectares chacun.
La cour intérieure du Château de Vinzel :
Le cadre est magnifique, les vignes sont situées depuis la lisière de la forêt jusqu’en bas de coteau dans une pente douce pour leur grande partie.
Depuis le chemin qui sépare la plupart des parcelles des deux propriétés, on est rarement aussi loin de l’autoroute qui traverse la région viticole de La Côte. Le vrombissement des autos s’en trouve fort diminué, et c’est bien agréable. A l’ouest, j’aperçois une chapelle dans les vignes. C’est en fait l’église de Luins, qui surplombe son village. Un peu plus tard, Thierry Ciampi me dira que ce lieu de culte est très prisé pour y réaliser des cérémonies de mariage tout particulièrement. La présence de quelques arbres, dont un cèdre, doit remplir de joie les photographes.
Je repars en direction du Château de Vinzel, oû l’oenologue ne tarde pas à me rejoindre.
Après quelques instants de discussion je me rends compte que ma proposition de visiter le Château de Vinzel en sa compagnie était justifiée ! Natif de Luins, il a grandit au …Château de La Bâtie, où son père a été vigneron jusqu’en 2009. Oenologue chez Schenk SA, il vinifie depuis une dizaine d’années les vins du château voisin. Il est parfaitement à même de connaître les différences, sinon les subtilités entre les deux crus ! Ainsi, le Ch. de Vinzel aurait naturellement des acidités plus basses que celles de son voisin immédiat, La Bâtie offrant des vins plus ronds et friands. Thierry Ciampi ne pouvant en expliquer la raison.
Nous commençons la visite dans les chais, après avoir salué Jean-Daniel Monachon, le vigneron du château, qui travaille sur la propriété avec son fils Fabien.
En cave, sitôt le débourbage réalisé, les cuves inox sont laissées vides, car les vins du Château de Vinzel sont élevés dans des foudres de 10.000 litres.
Comme souvent, les caractéristiques des vins diffèrent selon le foudre qui les accueille. Si le premier vin a une dominante fruitée (poire, mirabelle), le second l’est tout autant, mais avec une dimension minérale plus prononcée. Une de ses mises, est vendue intégralement au Château, par le vigneron. Le reste est vendu par la maison Obrist, une filiale du groupe Schenk, sise à Vevey, et ce alors que les bâtiments du groupe Schenk se trouvent tout près de Vinzel, à Rolle.
Au coeur des foudres, une quinzaine de fûts de chêne de 228 l. Je ne tarde pas à apprendre qu’ils contiennent une nouveauté : un vin de merlot. Nous le dégustons auprès de trois barriques. Le fruité est intense, avec des notes de noyau de cerise et de cerise noire. La bouche est dense, très précise, avec de très beaux tanins, bien enrobés, et surtout d’une fort belle finesse déjà. Ce vin qui fera l’objet d’un élevage d’une année, se prête particulièrement bien à la dégustation aujourd’hui.
Une nouvelle fois, j’ai envie d’écrire que le cépage merlot possède de magnifiques perspectives d’avenir dans le canton de Vaud.Avant de poursuivre notre discussion dans les vignes, Thierry Ciampi m’invite à découvrir la cave des vieux millésimes. Nombreux d’entre vous savent déjà que le chasselas du Ch. de Vinzel est un cru de grande garde. Aussi, il y a ici de « vrais » vieux millésimes, jusqu’au années quarante, couvés par Philippe Schenk en personne. Il y prend une bouteille du millésime 2002 que nous dégusterons dans les vignes, tout en continuant notre discussion, au soleil, ce bien presque rare en ce mois de juin (au 20 du mois, un journaliste météo parlait d’un déficit de 50 % d’ensoleillement par rapport à un mois de juin habituel) !
Vinzel, le « Dézaley de La Côte » !
Voila une expression que je ne connaissais pas. Elle serait surtout usitée entre les grands dégustateurs vaudois, ces férus de concours de dégustation, dont Thierry Ciampi fait partie de l’élite. S’il a glané le titre de Chapeau Noir lors d’un concours Jean-Louis, il n’est pas pour autant « repu », et continue de s’entrainer inlassablement, bien davantage par plaisir que par défi.Nous poursuivons notre discussion dans les vignes, puis dans le local de dégustation du château, où Jean-Daniel Monachon reçoit les visiteurs et les clients.
Notre discussion s’égare un moment sur les achats de vins que réalisent les parents à la naissance d’un enfant. « Bien sûr que l’on peut acheter du Bordeaux pour l’occasion, mais pour la longue garde, je conseille toujours d’acheter du chasselas ». Voila qui est dit !
Si le millésime 2002 avait quelques cheveux gris, principalement au nez, sa bouche devrait achever de convaincre le plus sceptique : elle reste d’une grande fraîcheur et d’un équilibre magnifique. Bref, elle n’a pas finie de causer !Lorsque je lui demande combien de vins il vinifie chaque année, il reste pensif quelques instants, puis me dit « certainement près de 350 » ! Des crus élevés et vinifiés à Rolle, au siège de la maison Schenk, mais aussi dans des domaines et châteaux du groupe, disséminés un peu partout en Vaud, et jusqu’à Sierre en Valais ! Assurément, les journées et les semaines de l’oenologue sont bien remplies et se doivent d’être parfaitement agendées. Passer deux heures de temps avec lui, et sans que la sonnerie de son Natel ne retentisse, relève d’une certaine façon d’un véritable privilège !
Thierry Ciampi est un homme discret et humble, passionné par son travail, dans lequel il est aussi précis que méticuleux. Il est bien sûr un dégustateur hors pair, chose qui intimiderait jusqu’à certains de ses collègues formés tout comme lui à Changins. C’est vous dire !
Voila en quelques mots comment résumer ce dégustateur et oenologue, encore fort jeune, mais qui marque déjà son époque de son savoir-faire et de son savoir-être.
Un homme précieux, mais dans le meilleur sens du terme, que je remercie pour le moment passé en sa compagnie, en toute simplicité bien sûr, au Château de Vinzel !