Rencontre avec Julien Fournier, et dégustation des crus de la cave Régence-Balavaud

C’est un peu la fin d’une période de transition à la cave Régence-Balavaud, à Vétroz, où Julien Fournier, l’oenologue et directeur de la cave depuis un peu plus d’une année désormais, a eu le temps de prendre ses marques. Ce valaisan a travaillé auparavant durant quatre ans dans une cave de Chamoson, où il était en charge tant du vignoble que de l’élevage des vins.
A la cave Régence-Balavaud, il en est aussi le directeur. La gestion ? C’est un aspect du travail qu’il lui tenait à coeur de développer depuis sa formation à l’HES Changins. Voici donc chose faite. Le jeune homme, d’un calme olympien, dégage beaucoup de sérénité. De toute évidence, cette évolution est davantage pour lui une progression naturelle -d’un point de vue personnel- qu’un défi.
Le millésime 2015 est donc le premier placé sous sa pleine et entière responsabilité. Il a aussi achevé l’élevage et réalisé les assemblages des vins du millésime 2014, suite au départ de son prédécesseur. Nous dégusterons ensemble des vins de ces deux millésimes. Une partie des vins du dernier millésime ne sont pas encore embouteillés  à la mi-juin.
C’est donc avec le millésime 2015 que ses choix de vinification, d’élevage et d’assemblage vont nous permettre de comprendre sa vision des vins qu’il souhaite réaliser. Car, bien sûr, il a déjà opéré quelques changements, qui se verront pour certains à partir de l’année prochaine seulement.
En terme de surface viticole, la cave Régence-Balavaud encave près de 40 % de raisins achetés à des vignerons (3,5 ha sur les 7,5). Pour Julien Fournier, avoir été également chef de culture, lui permet de pouvoir mieux exprimer ses volontés auprès des vignerons, car il sait parfaitement ce qu’il peut attendre des vignes d’un point de vue qualitatif.Regence Balavaud, vue exterieureLa cave est idéalement placée sur la route cantonale, à Vétroz, à proximité immédiate des vignes du cru …Balavaud. L’espace de dégustation est moderne, convivial, largement vitré sur le Nord et l’Ouest, et bordé d’une terrasse de plain pied qui lui permet d’accroître sa capacité d’accueil aux beaux jours.
Quelques jours après mon passage, le restaurant de la Régence à rouvert ses portes, ainsi que ses quatre chambres d’hôtes. Le chef qui en prend les commandes, a officié au restaurant Les Alpes à Orsières.
La dégustation des crus :
Fendant Rêverie 2015 : les vignes se trouvent sur les communes de Chamoson et d’Ardon. Très jolie expression florale au nez, sur la rose. La bouche est gourmande, j’apprécie sa vivacité et sa tonicité. Elle possède une jolie persistance.fendant reverie R balavaud
Johannisberg 2015 (vignes de Chamoson) : question presque rituelle désormais, elle concerne la seconde fermentation, la fameuse malolactique. Elle a été réalisée partiellement, à hauteur d’un tiers du volume. Joli nez, typé, sur des arômes d’amande douce, un peu de citron aussi. En bouche, une belle richesse, très pondérée, sans lourdeur. Il en résulte un vin digeste et délicat, frais, équilibré, de belle longueur, sur laquelle on retrouve cette petite amertume typique du cépage en Valais. Très apprécié. Relevons que pour une fois un Johannis se montre aussi ouvert peu de temps après la mise. Lui qui demande souvent six mois pour s’en remettre.
Petite Arvine 2014 (vignes de Chamoson) : belle typicité au nez avec des notes de glycine, de citron. Le nez est intense, très franc. La bouche est riche, il reste d’ailleurs quelques 6 ou 7 grammes de sucre résiduel. Cela n’affecte en rien l’équilibre et surtout l’indispensable fraîcheur de ce vin, et c’est tant mieux.
Païen 2014 (vignes de Leytron et de Conthey) : Le premier nez est minéral, avec une note de pierre à fusil intense. Puis les fruits jaunes et le caractère poivré se dévoilent et prennent le dessus. La bouche est vive, ciselée, tendue sans être agressive. Une nouvelle fois, c’est une question d’équilibre. Ici, la vinosité est « mise au pas » par la tension, mais cette dernière ne prend pas le dessus pour autant. C’est un vin digeste, qui se mariera avec des sushis et d’autres plats de poissons, pour autant que l’on évite d’y inclure de la crème, sauf peut-être si cette dernière est acidulée. Très jolie longueur finale, où l’on retrouve le caractère poivré perçu au nez. Un vin très apprécié. Coup de coeur.paien R balavaud
Pierrblanche 2015 : voila un vin d’assemblage (Arvine pour moitié, Amigne pour un peu moins d’un tiers, et de Johannisberg pour les 20 % restant). Très joli nez, intense, avec des notes de fleurs, d’agrumes. La bouche est délicate, le toucher est d’un grande finesse. Bel équilibre. A savoir attendre un peu, ce vin, pourtant agréablement expressif n’a été mis en bouteille que voici 15 jours seulement.
Amigne sèche 2014 (une abeille, soit de 0 à 08 gr de SR) : Note de d’écorce d’agrume évoquant le pamplemousse, mais aussi, et de façon discrète de l’élevage sous bois (deux tiers de la cuvée, et donc un tiers en cuve). En bouche, ce vin est fin, sapide, presque salin en finale, il ne manque pas de tonicité non plus et c’est tant mieux. Très apprécié.Amigne sèche R balavaud
Amigne 2015, 2 Abeilles (09 à 30 gr de SR) : Un amigne qui se présente de façon très minérale, avec une note fumée (le schiste de Vétroz peut-être). Bel équilibre général pour ce vin qui est tout de même un moelleux, mais qui possède une indéniable fraîcheur de bon aloi. La finale revient sur le fruité, avec des notes d’agrumes (pomelos, mandarine).
Rosé 2015 : c’est un rosé d’assemblage, avec une dominante de gamay (40%), et de pinot noir et de syrah, à part égales. Nez de fruits rouges (fraise, groseille). La bouche a une belle attaque, et reste agréablement vive jusqu’à la finale. Il est vrai que la part de syrah n’a pas fait sa malo. Belle richesse en bouche, avec un joli gras. C’est un rosé qui évoque à certains aspects des oeil-de-perdrix neuchâteloises par sa vinosité. Vin de soif par excellence, ce rosé n’est pourtant vendu qu’en chopine de 50 cl. Très apprécié.20160613_152129
Gamay 2015 (vignes Chamoson, Vétroz et Conthey) : Un gamay qui se présente sur le fruit, avec des notes de fruits rouges (fraise, groseille). C’est un gamay agréablement tonique en bouche, fin et délicat, de belle longueur. Un vin charmeur !
Pinot Noir 2014 Cuvée Blanca (vignes de Salquenen) : Il est très typé pinot ce vin. Le fruité est intense, sur des notes de petits fruits rouges et noirs, la bouche offre des tanins caressants, polis, et une belle acidité. Bel équilibre et fort jolie longueur finale.
Humagne Rouge 2015 (vignes de Vétroz et Chamoson) : Notes de sous-bois, de petits fruits rouges de belle intensité au nez. La bouche offre des tanins très fins, caressants au possible. Elle n’a pas une ampleur importante (ce qui est normal, ce n’est pas de la syrah ou du merlot), mais l’équilibre et sa fraîcheur offrent à ce vin beaucoup de « buvabilité ».
Très jolie longueur finale. Coup de coeur pour cette cuvée délicate au possible. Bravo !humagne rouge R balavaud
Diolinoir 2015 : La robe est sombre, voire opaque, le nez est frais, dominé par des notes fruitées de petits fruits noirs (cerise noire et mûre). En bouche ce diolinoir a une belle structure, de la fraîcheur et de forts beaux tanins lui conférant une jolie finesse. Belle longueur finale. C’est un très joli Diolinoir.
Merlot 2014 : un vin réalisé pour moitié en cuve et pour l’autre moitié élevé en fûts. Le nez évoque les fruits noirs (myrtille et mûre). En bouche, ce merlot a du volume. Bien que non dénué de finesse, il serait préférable de lui accorder une année ou deux de bouteille. Jolie longueur finale. C’est un vin qui a simplement besoin de temps pour être plus généreux et gagner en finesse.
Variation Rouge 2014 (pinot noir) : élevé en fûts de plusieurs passages (3e et 4e), ce pinot noir vit avec ce millésime sa dernière année de production, car dès 2015, l’ensemble du pinot noir de la cave Régence-Balavaud sera élevé en cuve. C’est un choix de l’oenologue qui repense la gamme de vins de la cave qu’il dirige. Il y aura donc d’autres changements, pas forcément très visibles ou perceptibles pour la clientèle. A la dégustation on perçoit des fruits noirs au nez, ainsi une touche fumée. La bouche est dense et agréablement tendue, avec un bel équilibre et une belle longueur. C’est un joli pinot noir riche mais loin de l’être trop !
Cornalin 2014 : Elevé en barriques de 2e et 3e passages. Au nez, la touche boisée est délicate avec une note d’eucalytus, puis une touche florale (pivoine) et de fruits (cerise noire) voire d’épices. La bouche a trouvé son équilibre entre la finesse, la fraîcheur et la tanicité et la belle matière glisse sur le palais. J’ai été tout près d’avaler ma gorgée de Cornalin tant ce vin gourmand et sapide. Très apprécié.cornalin R balavaud
Pierrouge 2014 : Joli fruit intense et mûr, assez « sudiste » dans son approche, avec des notes d’herbes aromatiques, mais aussi de petits fruits rouges et noirs. La bouche est riche, avec des tannins bien présents, mais fins. Elle fait preuve de « droiture » aussi (la présence majoritaire de cab.-sauvignon certainement).
Syrah 2014 : Elevage sous bois neuf pour moitié, et de 2e passage. Cette syrah s’est surtout révélée en bouche, où ses tanins très fins et son caractère sapide, presque salin aussi, m’ont beaucoup plu. C’est un vin riche mais digeste, et surtout harmonieux à souhait, où le boisé ne dominait pas. Belle longueur finale. Très apprécié.
Savarone 2014 : C’est un vin surmaturé du seul cépage gamaret. Les baies ont été flétries sur souche. Lors de la récolte, elles titraient 125 ° Oechslé. Il offre naturellement un nez très riche et intense, avec des notes d’épices (clou de girofle), de fruit (cerise noire, myrtille). La bouche offre des tanins fins, gras et donc bien enrobés. La qualité du toucher de bouche est bonne, plutôt caréssante. La température de service, un peu trop élevée, a desservi ce vin, laissant l’alcool devenir envahissant. A revoir.
Merci à Julien Fournier pour le temps consacré et toutes les informations délivrées.
Le site Internet de la Régence-Balavaudlounge exterieur cave Regence Balavaud