Vaud : couper son vin n'est plus jouer

Pratique totalement invraisemblable découverte dans la presse cette semaine, et bientôt mise à ban : celle du coupage de vin d’AOC. 
La petitesse des appellations vaudoises autorisait le coupage d’un vin d’une appellation avec l’apport d’une autre, à concurrence de 49 % !
Pire, voire même honteux : ce n’est pas un autogoal vaudois à la recherche de la qualité et ou d’une typicité perdue qui provoque l’arrêt de cette pratique. C’est parce que l’Union Européenne n’appréciait pas qu’un vin issu d’une des 28 AOC vaudoises contienne celui d’une autre appellation que le couperet est tombé, et l’information révélée au grand public.
Mise en conformité avec des normes extérieures certes, mais surtout vis-à-vis du consommateur, local avant tout. En Valais, certains sourient et en viennent déjà à regretter la « perte d’un charme » typiquement vaudois, une « vaudoiserie » ainsi que l’appelle un responsable de la coopérative viticole Provins, Gérald Carrupt.
Mais ne déterrons pas de hâche de guerre pour favoriser une lutte fratricide entre les deux plus grands cantons viticoles suisses. La question n’est pas là.
 
Quel avenir alors pour le vin vaudois ?
Le modèle bourguignon comme classement qualitatif à venir ?
Verrons nous prochainement de vins de table, d’appellations régionales, communales, et aussi des 1er Crus et Grands Crus ?
Rien ne semble encore décidé, mais rendre des règles de production toujours plus strictes en rapport avec la hiérarchie future des vins semble inévitable pour :
+ garantir une augmentation de la qualité (et de la typicité) des vins vaudois,
+ offrir transparence et confiance aux consommateurs.
Parmi les conséquences, il y aura vraisemblablement la disparition de plusieurs AOC, devenues trop petites.
Un véritable remembrement des AOC vaudoises devrait s’annoncer prochainement (en février prochain peut-être déjà). La réponse appartient au Conseil d’Etat vaudois et aux députés vaudois.
 
Dans son éditorial de la revue vaudoise Le Guillon n°32 (printemps/été 2008), Norbert Crüll, directeur de l’Office des Vins Vaudois (a démissionné depuis) citait Corinne  Clavien-Defayes, l’oenologue cantonale valaisanne : « Sincèrement, nos vins n’ont jamais été aussi bons. Mais personne ne le sait. Il faut travailler à ce que les gens le sachent« . Il enfonçait le même clou, en faveur de la viticulture vaudoise bien évidemment, citant quelques arguments  tels que les publications de la revue « Le Guilon » elle-même, la dégustation « syrah » du GJE, l’analyse de la RVF concernant les vins suisses, par exemple.
Valeur du travail et faire savoir, Philippe Gex, Gouverneur de la Confrérie du Guillon, le clamait lui aussi dans son message (toujours dans Le Guillon n°32), le terminant ainsi : « Debout tout l’monde! Nous y croyons, nous le voulons, nous le ferons! C’est une question d’image. »
En ma qualité d’amateur de nos vins régionaux, j’avoue ma consternation. L’image aujourd’hui pourrait être écornée. Dire qu’au même moment, d’autres se battent contre l’usage des copeaux de bois (par exemple) et le font savoir avec force, découvrir un coupage à 49 %, c’est un peu dur à avaler ! La sincérité, serait-elle une vertu perdue dans le monde de la viticulture ?
« Fortifier » son vin avec celui d’une autre appellation, cela s’est déjà vu : du vin d’Algérie dans des vins français (Bourgogne?), du Chateauneuf du Pape dans le bordelais, et peut-être même du vin lorrain (au 19e siècle) dans le Champagne (et toc!). Seulement, ce genre de pratique a daté. Aujourd’hui, cela serait considéré comme de la fraude, de l’abus de confiance. Aussi, pourquoi et toujours un train de retard chez nous ?
Gardons raison : la pratique du coupage n’était certainement pas l’apanage des meilleurs vignerons vaudois, qui comme ailleurs, travaillent dur pour valoriser leurs terroirs et leurs vins.
J’attends la suite avec impatience. Après pareil chaud-froid, la tiédeur (réformatrice) ne sera pas permise !
 
Laurent
 
Sources : 20minutes.