Anne Muller, la vigneronne qui vit avec la lune

Notre vigneronne a fait une entrée tonitruante dans le monde viticole après avoir exercé pendant dix ans comme éducatrice spécialisée. La fibre du vin, alliée à la chance de posséder quelques vignes familiales, a pris le dessus, et elle s’est lancée.
C’est avec une gamme de vins resserrée, qu’elle a rapidement été « repérée » par quelques cavistes, restaurateurs et journalistes. Puis, rapidement, le guide Gault & Millau, l’a placé immédiatement parmi les 100 meilleurs vignerons du pays, sans passer par la case « rookie de l’année ».Rothenberger-5241
La clientèle privée (60% des achats) s’est aussi très vite prise de passion pour cette femme au rire aussi puissant que communicateur, et dont le credo est un retour à une agriculture saine, délivrée des produits de synthèse. De fait, elle travaille en biodynamie, une méthode qu’elle suit depuis le début de son activité, soit depuis huit millésimes. Avec les vins du millésime 2014, c’est son cinquième millésime en qualité de vigneronne indépendante.
La biodynamie est une méthode de culture à base de produits naturels, encore controversée, car manquant de bases scientifiques aux yeux de certains. Elle tient compte par exemple des cycles lunaires pour administrer ses traitements. Ceux-ci, sont des procédés naturels, telles des infusions de plantes, en passant par la biodynamisation du sol à partir d’un engrais à base de fèces animales, préalablement placées dans des cornes de vache et enfouies dans le sol durant plusieurs mois d’hiver.
Anne Muller possède en propre 2,5 ha de vignes, complétées par 1,5 ha de vignes louées à des tiers, ce qui représente cinq parcelles de vignes que la vigneronne considère comme « homogènes ».
En 2015, la vigneronne rejoint le petit cercle des exploitations ayant obtenu la certification Demeter pour ses vignes et ses vins. Cela a induit des changements de taille car l’on ne peut être certifié uniquement pour le travail à la vigne, la cave doit l’être aussi. C’est donc Frédéric Blanc à Versvey, qui assure désormais la vinification des vins, faisant suite à Bernard Cavé.
Si certains la raille de posséder un gros pick up 4×4, elle n’en a cure, c’est avant tout un outil de travail, et non pas un symbole sociétal quelconque. D’ailleurs, au contraire de l’immense majorité de ses collègues, elle travaille le sol de ses vignes, deux fois l’an, avec un cheval appelé Cannelle, plutôt qu’avec un tracteur.Anne Muller et Cannelle

Elle apprécie cette communion entre le végétal, le minéral et l’animal, mais aussi le caractère quasi social qu’apporte la présence du cheval dans les vignes (Cannelle attire les enfants tout particulièrement, mais fait venir à elle aussi « des anciens » du village).

De ses vignes, elle en parle comme d’une personne. Elle cherche à comprendre ses ceps, à communiquer avec eux, à les sentir même, car après tout, il s’agit d’organismes vivants !
A t-elle observé un changement de comportement durant ces années ? Oui, clairement. La résistance des plantes face aux maladies a progressé. Ce qui ne veut pas dire qu’elles sont aptes à se défendre de tout et en toutes situations.


Bon an, mal an, avec des rendements moyens de 650 grammes au mètre carré, elle produit entre huit mille et dix mille bouteilles, soit six cuvées pour trois cépages : chasselas (cuve et amphore de béton), pinot noir (cuve, barrique et rosé) et un gamaret. Depuis toujours les vinificateurs ont cherché à réaliser des vins gourmands. Je crois que l’on peut dire que c’est d’abord pour cela que ses vins sont appréciés.
Désormais, la vigneronne souhaite s’approcher un peu plus des mystères de la vinfication.YVORNE, 2011-05-28 (295)