Au Domaine du Dézaley, chez Sébastien Butticaz, …pour lancer les caves ouvertes vaudoises 2013

Caves ouvertes vaudoises  mai 2013 Butticaz

Entrez, c’est ouvert !

Cette visite je la dois un peu au hasard, ce qui n’est certainement pas une première dans le contexte de visites de caves et de domaines viticoles relatés ici.

Nous partagions avec Sébastien Butticaz et son père la même table lors du souper qui avait suivi le « colloque Vin-Terre-Net » organisé dans le Val-de-Travers par Christophe Landry (de la cave La Clavenière, à Couvet), où les anciens de Changins s’étaient également réunis pour leur assemblée annuelle de l’année 2011. Voir ICI.CF Ramuz CP

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inutile de parcourir la ruelle C.-F. Ramuz pour se rendre à la cave. Elle est située à son entrée.

Dix huit mois plus tard, j’étais le premier arrivé dans cette cave située à l’entrée de la ruelle Charles-Ferdinand Ramuz, au Treytorrens (un lieu-dit de la commune de Puidoux) aux caves ouvertes vaudoises 2013, entre Dézaley et lac Léman, et aussi entre route cantonale et chemin de fer. A 11h, il y avait davantage de cyclistes que d’oenophiles qui circulaient sous le Grand Cru, et ce alors que le beau temps était de la partie. J’espère qu’ils auront afflué plus tard.

Mon hôte du jour est oenologue. Il enseigne du reste à l’école de viticulture cantonale de Marcellin, à Morges, où son collègue de formation, Lionel Widmer, est responsable des vinifications et de l’élevage des nombreuses cuvées qui y sont réalisées. Parmi les autres professeurs de cette école, citons deux vuillerains Fabrice Simonet et Etienne Javet. Une génération d’enseignants qui si elle décide de durer à Marcellin est là pour les 30 voire 35 années à venir (je ne cherche pas à vouloir leur faire peur, mais c’est à réfléchir quand même!).
Depuis le premier janvier 2013, Sébastien et son épouse Esther sont aux commandes de cette exploitation viticole. Le père de Sébastien, François, ayant pris une retraite bien méritée à septante ans.
Présentation des lieux :

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Entre route, voie ferrée et lac, les deux parcelles de pinot noir et des autres cépages rouges délaissent les terrasses du Grand Cru.

A 15 mètres seulement de l’entrée de la cave, mais un niveau plus bas, il y a une parcelle de pinot noir. Si tous les rangs sont enherbés, un sur deux est laissé en l’état. Les herbes, fleurs et autres plantes poussant presque à loisir, afin de concurrencer la vigueur de la vigne et de favoriser la bio-diversité.

Une deuxième parcelle de pinot noir se situe « plus bas », entre la voie ferrée et le lac. C’est une vieille vigne où les ceps sont taillés en gobelet, plantés à une concentration de 13.000 pieds/ha. Le clone 9-18 dit de Cortaillod est le plus utilisé.
C’est pour le moins « rock n’roll » pour s’y rendre, et ça l’est davantage encore si l’on est chargé. Mais dans tous les cas, il faut s’assurer, et plutôt deux fois qu’une,  qu’aucun train n’arrive…
Si l’arrachage de cette vieille vigne s’avère indispensable pour le vigneron, la question de son remplacement est déjà posée. Cette parcelle pourrait accueillir dans un futur proche de la mondeuse noire, cépage savoyard que l’on rencontre davantage dans le Chablais qu’en Lavaux.
A deux cent mètres, nous apercevons un héron posté sur un gros rocher situé à quelques mètres du bord du lac, et dépassant de peu du niveau des eaux du Léman. Ce rocher (le roc à Bedju) aurait dévalé la pente du grand cru il y a plusieurs siècles. Avant ou après le défrichage par les moines cisterciens ? Impossible de le savoir.
Mais d’autres rochers menaceraient aujourd’hui de se desceller, ce qui nécessitera une sécurisation prochaine des lieux.
C’est dans la cave de macération du vin rouge que se trouve le pressoir. Ce local est situé à proximité immédiate de la première parcelle de pinot noir, sous la zone de réception de la vendange du chasselas. Les quatres bacs utilisés pour la macération -vides aujourd’hui bien sûr, sont pigés à la main avant que les raisins ne soient pressés deux semaines plus tard.
La cuverie se trouve quelques mètres plus bas, sous la maison. Avant d’y entrer, Sébastien Butticaz me montre un élément d’une colonne romaine d’une soixantaine de centimètres de hauteur.
Le lieu où nous nous trouvons était déjà occupé voici deux mille ans. Une villa romaine avait été construite ici. Les autres éléments retrouvés lors des fouilles se trouvent quant à eux au musée cantonal vaudois.
De ses vins, mon hôte me confie à regret ne pas vinifier son Dézaley blanc dans des foudres de bois. Ceux-ci ont été remplacés par son grand-père par des cuves en ciment puis d’autres métalliques et thermorégulées. De toute évidence les foudres étaient hors d’âge. La modernité était à l’époque aux cuves inox, et elle est entrée « de plain-pied dans cette cave (si je puis dire, car les nombreuses marches que nous utilisons sont là pour démontrer que ce n’est qu’une image). Il y a bien deux fûts de chêne, presque cachés par du matériel, mais ils ne contiennent que de l’eau-de-vie.
Quelques brantes (hottes de bois) sont bien rangées en hauteur. Ces hottes doivent peser sans difficulté 20 kilos chacune. Elles contenaient une vendange -foulée à la vigne pour les blancs- qu’il fallait à l’époque descendre depuis les terrasses jusqu’à la cave, quasiment en ligne droite, avec quelque soixante kilos sur le dos. On peut dire qu’ils étaient robustes les anciens !

Sébastien Butticaz dans une parcelle de pinot noir. du Domaine du Dézaley

Sébastien Butticaz dans une parcelle de pinot noir. du Domaine du Dézaley


 
Un domaine viticole singulier :
Le Domaine du Dézaley porte bien son nom et l’on se demande pourquoi cela n’apparait pas de façon plus évidente sur la grande plaque située sur le local de réception de la vendange à l’entrée de la cave : nonante neuf pour cent des vignes du domaine est situé dans le cadastre du prestigieux grand cru vaudois. Voici effectivement quelque chose de singulier, et peut-être même d’unique parmi les propriétaires et encaveurs du Dézaley.
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depuis la route cantonale, sur sa partie Ouest, le Grand Cru est dominé par la tour de Marsens


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on s’attache très vite au Dézaley !

Outre les deux parcelles de pinot noir déjà évoquées, la majeure partie des vignes fait directement face à la cave, mais au-dessus de la route cantonale. Ces vignes de chasselas, sont réparties sur une quinzaine de terrasses, et sont cultivées selon les normes de la production intégrée. DSC_0744

La parcelle hors Dézaley (le fameux 01 % restant) est à Rivaz. Pierre Monachon, vigneron de la commune et syndic de celle-ci, m’avait expliqué que seuls les vignerons de la commune de Rivaz pouvaient mettre le nom de celle-ci sur leurs étiquettes, leurs collègues devant se « contenter » du nom de l’appelation, soit St-Saphorin.
La parcelle de Rivaz se nomme « Le Notaire ». On devinera aisément quelle était la profession de ce lointain aieul, un arrière-arrière grand-père du côté maternel de notre vigneron.
La surface des vignes du Domaine du Dézaley est de quelque 2,5 hectares. Trois quart de celle-ci est dévolue au chasselas, un quart (6.000 mètres carrés) aux cépages rouges. Si le pinot noir se taille la part du lion, il y a aussi du gamay. Et ce dernier, s’il est bien présent sur l’étiquette de la cuvée Vire-Vent, il ne couvre pourtant que quelque 70 mètres carrés de surface. Il y a aussi un peu de gamaret, d’ancellota (quatre treilles me dit Sébastien) du cabernet franc, et aussi du mara.
Singulier encore, ou anecdotique plutôt : les étiquettes sont d’une autre époque, bien que n’étant nullement désagréables. Elles devraient toutefois être changées dans une futur proche.
Sur celles-ci, on peut y lire « David Butticaz ». Si François, le père de Sébastien aura été le seul responsable de la cave durant quarante ans, il aura toujours conservé le prénom de son père sur les étiquettes. On lira tout de même son prénom sur l’étiquette du St-Saphorin « Le Notaire », mais aussi sur l’étiquette d’identification de la bouteille du Dézaley 2012 bien que la raison sociale ait changée voici près de cinq mois.DSC_0729
La mise en bouteilles est réalisée par un prestataire de service. La cave n’est pas équipée pour cela. Sébastien Butticaz sait qu’il lui est impossible de modifier ses locaux de travail pour changer cela dans un futur proche.
Si les bouteilles de St-Saphorin et du Dézaley empruntent la bouteille vaudoise classique de 70 cl, le vin rouge est misé dans un col bourguignon (voir photos plus bas).
 
Les vins dégustés :
+ St-Saphorin Le Notaire 2011 : expressif au nez et fruité, en bouche c’est un vin charnu, gras, avec une petite pointe de CO2, fin, et d’une fort belle persistance finale. Il mérite d’être attendu encore et de prendre une légère patine.
+ St-Saphorin Le Notaire 2012 : Un vin tonique, frais, vif, fruité, élégant, long, agrémenté d’une discrète touche citronnée en finale.
Les vignes ont un âge de 35 à 40 ans. A l’évocation du mode de taille, Sébastien Butticaz me parle du gobelet pour encore 80 % des vignes, mais une « rationalisation » des parcelles est déjà débutée, avec palissage sur fil et taille Guyot. Il faut savoir qu’avec le gobelet, les vignes sont plantées à 13.000 pieds/ha !
Après cette fort bonne entame, nous dégustons les cuvées de Dézaley :
+ La Dézaleyre 2011 : c’est le Dézaley blanc du domaine. Il s’agit d’un nom de fantaisie. Les vignes se situent à mi-coteau, sur des terres profondes. Un vin gras et puissant, encore bien fermé qui s’ouvre un peu à l’aération. Je perçois une petite note de caramel au lait. En bouche, l’équilibre n’est pas encore atteint. L’alcool domine -sans brûler- la finale.

Les deux vins blancs du Domaine du Dézaley

Les cuvées Le Notaire et Dézaleyre sont les deux vins blancs du Dom. du Dézaley.

+ La Dézaleyre 2012 : un Dézaley qui semble marqué par l’effet millésime. Il possède beaucoup de fraîcheur, il est droit, vineux, équilibré, frais, long. Très apprécié. Il vient pourtant d’être mis en bouteille (le lot qui se trouve à quelques mètres de là n’est d’ailleurs pas encore étiquetté). Un cadeau du ciel, de la terre et du vigneron à (encore) moins de 17 CHF ! Coup de coeur.

+ Dézaley Vire-Vent 2010 : un vin de pinot noir pour la très grande majorité des vignes. Mais il y a aussi une proportion plus faible de gamay (70 m2), et quelques treilles d’Ancellotta, de gamaret et de Cab.-sauvignon. Nez dominé par une note de griotte et de noyau d’amande, il est très fin, élégant, les tannins sont serrés. Belle longueur. Un vin qui a besoin d’un peu d’air pour s’ouvrir. A conserver encore en cave pour qu’il s’affine, une très légère astringence est encore perceptible.Vire-Vent, le Dézaley rouge du Dom du Dézaley
+ Dézaley Vire-Vent 2011 : Un joli vin élégant, structuré, avec des notes légèrement épicées, de belle longueur, Un ensemble qui ne manque surtout pas de fraîcheur.
 
Vers le site Internet du Domaine du Dézaley,