Vieux millésimes dans le Lavaux (qu'ils disaient)


Dégustation de vieux millésimes qu’ils disaient : après trois vins sur six qui couvraient les cinq dernièrs millésimes, on se rendait bien compte que l’abus de confiance n’était pas loin.
Mais ne soyons pas chagrin : il faut savoir retirer de toute chose l’aspect positif. Quelques années plus tard, je proposais ma dégustation de vins du Dézaley, avec de vrais vieux millésimes ! Avec bonheur!

Une idée préconçue ? Chasselas rapidement !
Voici le compte-rendu d’une dégustation d’anciens millésimes blancs de l’appellation Dézaley, dans le Lavaux. Le Lavaux est la région viticole vaudoise située entre Lausanne et Vevey. Fantastique situation face au lac Léman, l’exposition est face au Sud, il s’agit de vignobles en terrasses. Un vrai régal pour les yeux tant la majesté des lieux est grande. Le Chasselas, cépage roi de la région tient bien évidemment la vedette.
Cette dégustation s’est déroulée à la Maison du Vigneron à Epesses, le samedi 06 novembre. Il s’agissait en fait d’une verticale du Dézaley « les gradins », du Dom. Etienne & Louis Fonjallaz, vignerons encaveurs à Epesses.
Les vins ont été dégustés dans un ordre chronologique décroissant. Les millésimes ont été dévoilés après dégustation de chaque vin pour ne pas influencer les participants. Ils ont tous été servis après passage en carafe.
Vin 1 : Robe jaune aux reflets verts, moyennement intense, brillante, limpide. Le vin est trop frais, aussi le nez est fermé dans un premier temps. En se réchauffant, le vin apparaît marqué par des notes lactiques et de feuilles (tilleul), de citron, et plus discrètement, miellées. La bouche possède un perlant fin, la matière est riche, le vin possède un joli gras et une amertume apparemment typique de l’appellation. Une impression alcoolique trop appuyée gène et gâche quelque peu la fraîcheur première. La finale est très longue néanmoins. Millésime 2002.
Vin 2 : Robe jaune intense, limpide. Le nez est plus riche, intense : au premier nez, je perçois des notes de cire, de fruits jaunes, de caramel. Ainsi qu’un aspect d’oxydation très léger. Au réchauffement dans le verre cette impression s’estompe totalement, alors que les notes lactiques gagnent en intensité. La bouche est grasse, minérale, épicée. Elle possède une belle attaque. L’ensemble apparaît fondu, équilibré, avec une finesse indéniable. Belle longueur. Au cours de la dégustation, le vin ne cesse de se bonifier en gagnant une amplitude étonnante. Une bien belle bouteille. Il s’agit du millésime 2000 -soupçonné ou reconnu par chacun.
Vin 3 : Robe jaune d’intensité moyenne, avec des reflets verts. Le nez m’apparaît herbacé, lactique, puis à l’aération des notes d’amande et de noisette apparaissent quoique discrètement. La bouche est plus minérale et tendue que celle des deux vins précédents. Elle est néanmoins équilibrée, structurée, de belle persistance. La finale est dominée par de discrètes notes d’agrumes. En se réchauffant, le vin apparaît un peu asséchant. Je trouve ce vin plutôt austère actuellement, à attendre. Re-dégusté à l’aveugle une seconde fois, deux heures plus tard (deux heures en carafe ?), je ne le reconnais plus tant au nez qu’en bouche : la maturité s’exprime différemment, les fruits jaunes dominent, le côté légèrement asséchant a également disparu. Millésime 1999 (veuillez lire nonante neuf, bien évidemment).
Vin 4 : Robe jaune de belle intensité. Limpide. Le nez est très lactique puis les fruits jaunes dominent. La bouche possède un léger perlant qui lui confère une certaine fraîcheur en attaque, puis des notes poivrées accompagnent la matière qui possède une persistance moindre à celle des vins précédents. Au réchauffement, des notes de bonbon anglais apparaissent avec intensité. A ce stade de la dégustation, c’est le vin qui me plait le moins, par son manque de complexité et peut-être par sa plus faible acidité. J’ai l’impression de ne pas être en phase par rapport aux avis exprimés par les personnes présentes qui l’apprécient davantage que moi. Millésime 1997.
Vin 5 : La robe jaune est plus soutenue. Elle est limpide, brillante. Le nez est mûr et complexe : fruits jaunes (pèche) et fruits secs, mais aussi –discrètement- de cire, et toujours des notes lactiques évoquant le caramel. En bouche, l’attaque est vive, une belle acidité supportée par un léger perlant séduit d’emblée. La matière est riche, équilibrée, l’ensemble est fondu et possède une indéniable finesse. Très belle longueur. Un bien beau flacon qui semble arriver à son apogée. La question que je me pose, c’est combien de temps peut-il maintenir ses qualités désormais ? Millésime 1995.
Vin 6 : La robe est jaune avec des reflets verts. Limpide et brillante. Le nez apparaît frais, avec des arômes des fruits jaunes, d’amande, mais aussi de cire, et aussi une légère impression d’oxydation, qui a nouveau s’estompe à l’aération. La bouche possède de la richesse, du gras, un caractère épicé. La finale est dominée par les arômes lactiques qui sont décidément présent à tout âge de ces vins. L’acidité est moyenne. On devine une année riche en soleil. Le vin se bonifie en se rechauffant, et offre une tenue en bouche superbe.
Louis Fonjallaz annonce le millésime 1989 (huitante neuf, s’il vous plait !). Un Dézaley de quinze ans d’âge, qui ne les parait pas. J’ai peut-être ici un début de réponse à ma question sur le vin précédent.
Mes impressions générales de cette dégustation :
Mon trio préféré : 1995, 1989, 2000 et, pas loin après, le 1999.
Mon étonnement le plus important : la présence de notes lactiques à tous les âges de ce vin et, certainement le fait d’une fermentation malo-lactique complète de façon systématique. De fait, les Dézaley semblent plutôt appartenir à une catégorie de vins de chasselas opulents, que des vins de tension, minéraux.
Car, à dire vrai, je n’ai pas perçu de notions minérales fortes (ce qui apparaît par exemple de façon plus nette en dégustant des fendants valaisans de Marie-Thérèse Chappaz, de Jérôme Giroud, par exemple). La notion de terroir, en tout cas, celle liée à la caractéristique du sol, ne m’est pas parue évidente durant cette dégustation. Peut-être qu’en combinant plusieurs appellations et crus différents au cours d’une dégustation cela apparaîtrait davantage ?
Puis les CR, d’autres vins de la commune d’Epesses, dégustés au cours du buffet dînatoire qui a suivi :
Epesses 2003 A. & L. Fonjallaz : robe jaune pâle, nez discret évoluant vers de fines notes de noisette et de citron. Bouche grasse, dotée d’une acidité plus prononcée que celle de la plupart des vins dégustés jusque là. L’ensemble est bien constitué, équilibré, de belle longueur. Un vin très agréable.
Dézaley « les gourmets »2003, Pierre Ogay : robe jaune pâle, avec des reflets verts. Le nez évoque les fruits jaunes mais aussi des fruits secs (noisette, amande) ainsi que …des notes lactiques. En bouche, on retrouve des notes épicées. Le vin présente un bon volume en bouche, mais il manque de tension, l’acidité est particulièrement faible. En se réchauffant un peu des notes de bonbon anglais apparaissent.
Dézaley « Corniche » 2003, Vincent & Blaise Duboux, Epesses : Robe jaune très pâle à reflets verts. Le nez évoque le bonbon anglais, mais aussi la noisette et également une pointe d’agrume (citron). La bouche m’apparaît d’abord assez grasse, mais le volume s’estompe rapidement. Une amertume accompagne la fin de bouche qui n’offre pas une longueur comme celle de l’Epesses dégusté juste avant. Elle m’apparaît aussi déséquilibrée par l’impression alcoolique qu’elle procure.
Dézaley « Marsens » 2003 Jean-François Bovard, Epesses : Robe jaune pâle, nez minéral avec des notes puissantes de fumée. La bouche possède équilibre et un bon volume. Finale de bonne longueur où l’on perçoit après un léger réchauffement une petite impression alcoolique.
Dézaley « La Trinquette » 2003, Pierre Fonjallaz : Robe jaune pâle, nez dominé par de fines notes de bonbon anglais. La bouche est souple, son volume paraît étriqué par rapport aux vins précédents, finale courte.
Epesses 1996 « Epine Noire » E. & L. Fonjallaz. Un vin de pinot noir. La robe est d’une rouge peu intense, légèrement trouble. Si le nez est encore assez flatteur (arômes floraux, de fruits rouges, légèrement épicé), la bouche marque le pas : la structure est faible, presque terne tant le volume fait défaut, sans longueur. Pour moi, c’est un vin à l’apogée dépassée.
Deux liens sur les vins du domaine et de la région :
www.fonjallaz.ch Les vins du domaine E. & L. Fonjallaz
www.baronnie.ch La Baronnie du Dézaley, est une association de douze encaveurs du Dézaley, liés entre eux par une charte de qualité (culture de la vigne et vinification du chasselas), et dont l’un des buts est de promouvoir les vins de l’appellation Dézaley Grand Cru, mais aussi de respecter son terroir.
Il est possible d’acquérir une caisse de douze flacons (une par producteur de la Baronnie du Dézaley) d’un seul millésime, et de réaliser -par exemple, une horizontale Dézaley Grand Cru.
Sauf erreur, c’est actuellement le millésime 2000 qui est à la vente. Sans doute le 2003 suivra prochainement.