Forza Ticino : les vins du Tessin à Lausanne

Ticino Wine avait confié les amateurs à venir déguster les vins de son canton à Lausanne ce lundi 10 novembre 2008 après-midi.
Professionnels, amateurs, blogueurs ou pas, ont répondu présents à l’invitation des trente vignerons tessinois qui avaient fait le voyage vers la capitale Olympique.

Ainsi que l’interprofession valaisanne de la vigne et du vin (IVV) l’avait fait il y a quelques années, Ticino Wine nous a offert la « vie palace » le temps d’un après-midi.

J’ai pu participer (merci Cornalin !) à un séminaire mené par Urs Mäder  (vendeur de vins) et Francesco Tettamanti (directeur de TicinoWine et œnologue). Merci à eux pour la qualité de leur intervention.
Vingt et un vins dégustés, mais aussi et surtout, des commentaires  très précis, nombreux, pour nous aider à mieux appréhender la viticulture tessinoise.

Point de faux semblant avec Urs Mäder, qui connaît les forces et les faiblesses du vignoble tessinois. Aussi, il n’a pas été homme à chercher à nous faire prendre des vessies pour des lanternes. Son regard aiguisé s’est toutefois voulu particulièrement constructif, une âme de pédagogue sommeille en lui.
La dégustation qu’il a dirigé avec Francesco Tettamanti ne cherchait donc pas à dresser des couronnes de laurier au quatrième canton viticole de Suisse (en terme de surface de plantation). Elle se voulait le reflet le plus fidèle possible de la production du vignoble tessinois. Les différents terroirs, acteurs de la production, et bien sûr cépages cultivés étaient présents.
Durant cette dégustation, c’est le premier vin qui m’a le plus impressionné par sa fraîcheur, sa tension, son fruité, son équilibre, bref, pour tout dire sa digestibilité. Ce vin, c’est le Giornico d’Oro 2006 de Monsieur Gialdi. Vin de Merlot élevé en barrique (12 mois, +/-), dont l’élevage était particulièrement bien intégré, discret. Urs Maeder disait de ce producteur qu’il est toujours en recherche. Il persévère et, millésime après millésime, il n’a qu’un but : être au sommet, produire le plus grand vin possible. Après le séminaire, je suis allé rendre visite à Monsieur Gialdi. Après avoir dégusté une seconde fois le Giornico d’Oro 06, j’ai dégusté un Sassi Grossi 06 du même millésime. Un vin plus riche, plus dense, mais l’impression reste la même : un vin particulièrement digeste, fin, équilibré. Cette cave est assurément ma découverte du jour.

Pas curieux apparemment, je découvre le lendemain seulement (mardi 11/11), que le Sassi Grossi 2005 de ce producteur a été récompensé au grand prix du vin Suisse 2008 d’une médaille d’or dans la catégorie …Merlot. Feliciano, le bien nommé en quelque sorte.

Les vins blancs :

Ils sont très minoritaires, moins de 10 %. Pour pallier à un manque réel de vins blancs, 15 % de la production du merlot (cépage qui représente un peu plus de 80 % de la production cantonale), est vinifié en blanc. J’avoue ne pas avoir été séduit par les vins proposés. En raison d’un manque de fraîcheur récurent. Le vin le plus apprécié a été le sauvignon blanc  Novi nal drunpa 2006 de Monsieur Mauro Ortelli, un vin vif, aromatique et frais, très joliment construit. Le manque de typicité des vins blancs, conduit les producteurs à s’essayer dans des assemblages. J’ai ainsi dégusté un vin de la cave Chiodi d’Ascona, malheureusement je ne l’ai pas retrouvé dans les fiches techniques de leur site Internet (doral, sauvignon blanc et chardonnay de mémoire).

Parmi les vins rouges :

Une seule Bondela, l’unique cépage autochtone du Tessin. Certainement pas le vin le plus inintéressant dégusté lundi pourtant (acidité de bonne aloi, fruité complèxe, une certaine suavité en bouche). La  Bondola aurait peu d’avenir car sa richesse en sucre, une fois sa maturité atteinte, est faible.

Le merlot bien sûr. Ce cépage bordelais est devenu le cépage principal d’un canton décimé par le phylloxera à la fin du 19eme siècle. Cépage -on l’a vu, ultra-majoritaire avec 80 % de la surface de plantation. Urs Mäder lui reproche toutefois une tendance à la réduction, qui est presque devenue la marque de fabrique de ce cépage au Tessin. Selon lui, les vignerons devraient apprendre à l’élever différemment, voire à l’assembler avec d’autres cépages plus souvent peut-être aussi. Ainsi, Monsieur Mäder pense que le cabernet franc devrait avoir son rôle à jouer dans l’encepagement régional. Il regrette toutefois que le cabernet sauvignon ait davantage la cote auprès du vignerons, car il est de toute évidence trop tardif pour la région.

A propos d’histoire. Urs Mäder nous a évoqué succinctement le passé viticole du Tessin. Ce dernier aura connu jusqu’à 8500 ha de vignes, et des vins vendus un temps durant jusqu’à Venise. La production de ces vignes en quantité de vin, était identique à celle d’aujourd’hui, avec 1000 ha seulement. Autres rendements certes, méthodes culturales différentes (pergola et polyculture : le vigneron de l’époque était un agriculteur et un éleveur), et certainement aussi du raisin de table, et bien sûr du raisin pour faire de la Grappa. Avant le phylloxera, le Tessin comptait plus de cinquante variétés de cépages.

Second cépage rouge du canton : le gamaret. Ce cépage créé à Changins est particulièrement résistant aux maladies. De façon étonnante, on a remarqué une nette amélioration qualitative des vins de gamaret lorsque ce cépage atteignait sept ans d’âge. Urs Mäder regrettant toutefois que des recherches sérieuses (ampélographiques et de sols n’aient pas été entreprises pour équilibrer l’encépagement. Dans le climat humide du début de l’automne du Tessin, il est un appoint sérieux. Les pluies qui viennent d’affecter le Tessin ces quinze derniers jours étaient en quantité l’équivalent de celles du Valais central durant une année ! Il vaut mieux que la vendange soit déjà rentrée !
Aussi, a t-il rendu hommage à un romand, installé dans le Tessin qui a fait ce travail de sa propre initiative. Il a apporté une lecture du terroir et une viticulture novatrices, loin du travail réalisé par les vignerons tessinois de souche ou ceux d’origine Suisse allemande. Nous avons donc dégusté un vin de Syrah 06 de ce producteur. Un vin de caractère, mais pour ma part je l’ai trouvé trop chaud. Une impression alcoolique dominait, tout comme le boisé.
Aujourd’hui, le canton compte 265 producteurs. Les 1000 ha sont disséminés dans une zone de 70 km de longueur pour 25 de large. On ne voit donc pas de vignes continuellement au Tessin. Il s’agit d’un vignoble morcelé. Pour cet intervenant, les vins produits sont surtout des vins d’auteurs. Auteurs qui garantissent le style, la qualité et le genre même des vins produits.

Un hic sérieux : certains vins à peine embouteillés et livrés aux fournisseurs sont immédiatement mis sur la carte des vins de certains restaurants. Un non sens dû aux faibles quantités produites et à une forte demande.
Pour essayer de conclure : voila une approche des vins du Tessin particulièrement riche (30 producteurs et donc la possibilité de déguster un nombre conséquent de vins durant la journée). Le séminaire s’est avéré terriblement efficace. Un plus indéniable pour « accrocher » l’attention des participants avec l’aide de deux modérateurs aussi pointus.

Une adresse incontournable pour la connaissance des vins du Tessin : www.ticinowine.ch

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