Saveurs suisses, le caviste belge des vins confédérés

Un commerce de vins suisses hors des frontières nationales ?
Est-ce seulement possible quand un pour cent des vins helvétiques est vendu hors du pays ? Mais oui, il existe, et il a pignon sur rue (ou presque car son commerce est « online »).
Faisons connaissance avec Alex, qui réalise un travail de pionnier en la matière !
Bienvenue en Belgique !
 

Alex, quel est votre parcours qui vous a amené à ouvrir ce commerce de vins
suisses en Belgique ?

Rien dans mon formation ne me prédestinait à exercer cette activité,
puisque j’ai une formation universitaire de juriste…
Après quelques années passées en tant que juriste d’entreprise, j’en avais
un peu assez de lire du matin au soir des textes juridiques, il me fallait
plus d’action et surtout de défi !
Je souhaitais devenir indépendant et faire quelque chose dans le domaine
du vin, mais pas quelque chose que tout le monde faisait (vins français,
italiens, chiliens, etc…). Et si possible aussi, un emploi qui me
permette de voyager.
J’avais eu l’occasion de par mes voyages en Suisse, de découvrir la réelle
qualité des vins suisses et j’étais frustré de ne pas retrouver en
Belgique tous ces vins (si ce n’est un fendant bas de gamme en grande
surface). L’idée m’est donc venue assez rapidement de faire d’une passion
mon métier !
Un premier vin suisse en souvenir ?
Mon père avait dans sa cave quelques vins suisses. Le souvenir qui me
vient à l’esprit doit être un fendant de la Cave La Tornale à Chamoson.
Bref, un classique du vin suisse. Et aujourd’hui, je travaille avec ce
vigneron !
Votre travail avec les restaurateurs d’outre-quiévrain : quels vins les
intéressent le plus ? Les spécialités certainement (PA, Humagne rouge,
cornalin), Vous avez quelques exemples de plats font-ils en accord avec
ces vins ?

Sans aucun doute, les spécialités sont les vins qui les intéressent le plus.
La plupart des restaurateurs avec qui je travail ont un sommelier qui peut
susciter l’intérêt chez leurs clients de déguster un vin « exotique » sur un
cépage rare et inconnu en-dehors des frontières helvétiques.
Je dois avouer aussi que les cépages plus internationaux, tels les Syrah
valaisannes ou les Merlot (vinifiés en blanc comme les rouges), mais aussi                                         les Pinot Noir des Grisons ont un très beau succès.
Pour ce qui est des accords, comme il s’agit de cépages qu’ils ne
connaissent pas, c’est plutôt moi qui vais les guider dans des idées
d’accords. Ainsi, rien de plus magnifique qu’une petite arvine avec des
fruits de mer ou un beau plat de poisson.
Une constante toutefois : on reste dans des accords de belle gastronomie.
Le Valais est une destination touristique importante depuis la Belgique
(Val d’Anniviers ++), les acheteurs potentiels de votre cave ne vont-ils
pas acheter leurs crus sur place ?

En effet ! A de nombreuses reprises lorsque j’organise une dégustation
dans un magasin qui vend quelques uns de mes vins, en fin de dégustation
les gens me disent qu’au moins maintenant, ils savent où allez chercher
leurs vins…
Je n’oublie pas au passage de leur signaler que la Suisse n’étant pas
membre de L’U.E., le transport d’alcool est limité en quantité…
Ce côté un peu anecdotique, mais véridique, fait que aujourd’hui, mes
principaux clients sont des restaurateurs (80 %).
Mais il ne faut pas croire pour autant que tous les belges qui vont en
Suisse connaissent les crus locaux.
Bon nombre qui vont sur place chaque année pour les sports d’hivers depuis
des années, ne connaissent encore aujourd’hui que la Dôle des Monts et le
Fendant les Murettes…
Assortiment : votre sélection est large, et qualitative. Elle est
toutefois très centrée sur le Valais (la diversité des cépages et le fait
que la qualité des vins soit reconnue certainement). Comme vous
semblez beaucoup travailler avec des restaurateurs, cela laisse entende que peu
d’amateurs se rendent compte que :
– les vins suisses sont d’un très bon niveau qualitatif (*),
– que les producteurs sélectionnés font partie de la crème de la
viticulture du pays,
– nombre de vins offrent un très bon rapport Q/P (le liquoreux de la cave
Philippoz par exemple).

Il y a beaucoup de choses à dire.
En effet, ma gamme est très centrée sur le Valais, c’est vrai, mais ces
derniers temps, j’élargi ma gamme sur d’autres cantons (ainsi un St
Saphorin ou des Pinots Noirs des Grisons).
La vente de vins suisses en Belgique relève véritablement du parcours de
combattant ! Rien n’est plus difficile que de se battre contre des idées
reçues selon lesquelles le vin suisse se limite à des vins de fondues et
raclettes !
Pour la majorité des gens, c’est à ce genre de stéréotype qu’ils se
raccrochent, tout simplement parce que depuis des années on ne trouve dans
les grandes surfaces que le même fendant de la même maison et d’une
qualité plus que médiocre. Et puis bon, la place du vin français en
Belgique est très importante. N’oublions pas que nous n’avons quasiment
aucune tradition vinicole chez nous.
J’ai donc délibéremment opté lorsque j’ai commencé, à ne choisir de
travailler qu’avec les vignerons qui ont opté pour la qualité afin
justement que les personnes qui en Belgique goûtent les vins que j’importe
se disent dès la première gorgée : whaw, c’est du vin suisse ?
Qui plus est, comme je travaille essentiellement avec des restaurants
gastronomiques, j’espère que petit à petit, dans l’esprit du consommateur,
à force de voir du vin suisse à la carte de ces restaurants, l’approche du
client sera différente et qu’il se dira que si il y a du vin suisse à la
carte d’un 3, 2, 1 étoilés Michelin ou même tout autre restaurant
gastronomique, c’est qu’il y a quand même quelque chose à découvrir dans
le vignoble helvétique !
Par contre, détrompez-vous sur l’aspect rapport qualité/prix. Le vin
suisse a la réputation en Belgique d’être un vin chèr et de luxe ! Tout
le monde n’est bien entendu pas prêt à mettre 19 € dans une bouteille de
petite arvine. Et puis, tout est toujours ramené à une comparaison avec le
vin français. Plus le vin est chère, mois le consommateur lambda est prêt
à débourser pour un vin autre que français. Pourquoi ? La peur d’être
déçu.
Il faut toutefois un peu nuancer, le consommateur flamand est nettement
plus ouvert et réceptif au vin suisse que le consommateur francophone,
même si bien entenu il ne faut pas généraliser.
Faîtes-vous des rencontres avec les amateurs (dégustations ciblées pour
présenter les vins ?)

Oui, j’en faisais. J’en parle au passé car malheureusement, il est encore
très difficile de faire bouger le consommateur belge pour découvrir du vin
suisse.
Par contre s’il s’agit de déguster de grands noms du Bordelais, il faut
refuser du monde. Allez comprendre…
Donc aujourd’hui malheureusement, je n’organise plus de dégustation du
style journée portes ouvertes.
Par contre, je présente souvent le vignoble helvétique auprès de clubs
d’oenologie, qui mettent la Suisse à l’honneur, et auprès desquels j’ai
toujours énormément de retours positifs !
Cela demande plusieurs déplacements annuels pour rencontrer les
vignerons, déguster les vins ? Vos vacances sont essentiellement suisses
aussi ?

Oui en effet, je suis toujours à l’affût de nouveaux crus. Je tourne
régulièrement à travers le pays pour dénicher encore des flacons qui
mériteront de faire partie de la gamme.
Et puis bon, avec le temps, des liens d’amitiés se sont créés avec la
plupart des vignerons.
Des reproches à faire à la viticulture suisse ? (suivi oenologique trop
poussé, … ?).

Si je n’avais qu’un seul reproche à faire, c’est que à côté des quelques
stars du vignoble, il y a encore beaucoup trop de vignerons qui n’ont pas
compris qu’ils ont un véritable trésor entre leurs mains, mais pour de
multiples raisons, choisissent la facilité de produire en quantité.
Autre reproche à titre plus personnel, les quantités que me fournissent
certains vignerons sont insuffisantes…
J’espère que le message passera 😉
Une conclusion ?
Tous les vignerons avec qui je travaille donnent pour moi un sens au travail                                       de la terre, au respect de la vigne, à la qualité !
Une très bonne relation de confiance s’est établie entre nous.
L’avenir du vignoble helvétique ne pourra qu’être encore meilleur pour
autant qu’aucun des vignerons ne cèdera à la facilité en sacrifiant la
qualité à la quantité dès lors que la reconnaissance internationale
viendra !

Merci Alex, bonne continuation bien sûr, et au plaisir de vous croiser sur le chemin du vignoble ou dans une cave !
Laurent
 
(*) je fais ici mention d’un prix de vente en Belgique qui est très proche de ceux pratiqués en Suisse.
 
Saveurs Suisses
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